Couverture du n° 110 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 110

Déshumanité, de Julien Syrac: la recherche du réel perdu

 

Déshumanité est un essai littéraire. L’auteur, Julien Syrac, s’interroge sur ce qui a conduit l’écrasante majorité de gens à accepter passivement les mesures restrictives prises durant l’année 2020 contre le covid, des mesures souvent contradictoires. En s’appuyant surtout sur les grands moralistes et les grands romanciers, Julien Syrac avance l’idée que cette passivité était pour ainsi dire à prévoir. Depuis environ deux siècles, dit-il, notre civilisation poursuit sans faute le chemin de l’abstraction, des projets sociaux enchanteurs conçus in vitro, et des utopies «scientifiques» au détriment de la réalité. C’est alors ainsi que le jour du covid l’humaine condition cède devant les statistiques et l’intelligence commune devant les algorithmes.
Au risque de l’étourdissement général sous l’emprise de l’abstraction, nous répondons, depuis la fondation de L’Atelier, par le dialogue. Ici, ce dialogue se réalise sous la forme d’un commentaire polyphonique du livre de Julien Syrac, d’une ouverture vers la poésie et la musique, des découvertes (Lutz Seiler, Hiroko Oyamada) et des rappels salutaires (Jack-Alain Léger, Pier Paolo Pasolini, Faulkner, Dumas et Octave Mirbeau).

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Déshumanité, de Julien Syrac: la recherche du réel perdu

 

Déshumanité est un essai littéraire. L’auteur, Julien Syrac, s’interroge sur ce qui a conduit l’écrasante majorité de gens à accepter passivement les mesures restrictives prises durant l’année 2020 contre le covid, des mesures souvent contradictoires. En s’appuyant surtout sur les grands moralistes et les grands romanciers, Julien Syrac avance l’idée que cette passivité était pour ainsi dire à prévoir. Depuis environ deux siècles, dit-il, notre civilisation poursuit sans faute le chemin de l’abstraction, des projets sociaux enchanteurs conçus in vitro, et des utopies «scientifiques» au détriment de la réalité. C’est alors ainsi que le jour du covid l’humaine condition cède devant les statistiques et l’intelligence commune devant les algorithmes.
Au risque de l’étourdissement général sous l’emprise de l’abstraction, nous répondons, depuis la fondation de L’Atelier, par le dialogue. Ici, ce dialogue se réalise sous la forme d’un commentaire polyphonique du livre de Julien Syrac, d’une ouverture vers la poésie et la musique, des découvertes (Lutz Seiler, Hiroko Oyamada) et des rappels salutaires (Jack-Alain Léger, Pier Paolo Pasolini, Faulkner, Dumas et Octave Mirbeau).

Sommaire

SOMMAIRE

Couverture du n° 110 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 110

Déshumanité, de Julien Syrac: la recherche du réel perdu

 

 

SOMMAIRE

Ouverture

Pierre Saïet, Une si juste colère
Thierry Gillybœuf, Généalogie du regard
Marion Messina, Déshumanité : le journal de la désintégration
Charles-Gaby Max, Le point Syrac
Raphaël Arteau mcneil, En attendant le roman
Alexandre marchadier, XIX 2.0
Jérôme Couillerot, Full contact
Patrice Jean, Vis comica
Slobodan Despot, Le pari du parking
Baptiste Arrestier, Un pendu peut-il éclairer ? – À la recherche d’une approche réaliste
Guillaume Narguet, Éloge de la longueur
Lakis Proguidis, Le livre de l’amitié et de la liberté

À la une : Yves Lepesqueur

Critiques
Morgan Sportès, Le dernier blues de Jack-Alain Léger
Massimo Rizzante, Pier Paolo Pasolini – Une rencontre où la littérature ne suffit pas
Jacques Dewitte, Janáček et la polyphonie des émotions
– Milan Kundera, critique musical
Jean-Yves Masson, Lutz Seiler : La réunification allemande au miroir du roman
Raphaël Arteau Mcneil, Travailler ? – L’Usine, de Hiroko Oyamada

À la une : Boniface Mongo-Mboussa

De près et de loin
Olivier Maillart, Réflexions sur quelques-uns de mes contemporains
Fernando Arrabal, Comme des étincelles

À la une : Marion Messina

Au fil des lectures
Benoît Duteurtre, Au fil des lectures (et autres considérations…)

 

Ouverture

OUVERTURE

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Déshumanité, de Julien Syrac: la recherche du réel perdu

 

 

À la mémoire de Jean-Jacques Sempé (1932-2022).

Quelqu’un devait s’arrêter et réfléchir sur ce qui se passe autour de nous et à l’intérieur de nous depuis deux ans et demi. C’est chose faite : Déshumanité, de Julien Syrac. Avec un sous-titre pour bien situer la chose: «Approche historique de l’an de disgrâce 2020». Difficile de ne pas se rendre compte que Déshumanité concerne notre vie en régime covidien.

Il y a quelques années, François Ricard commentait ironiquement le fait que certaines universités canadiennes supprimaient au début des années 2000 leurs départements de théologie et de philosophie pour «manque d’effectifs» (sic). S’il était encore vivant, il serait ravi d’apprendre que les départements des «humanités digitales» (re-sic) commencent à proliférer dans nos anciens temples du savoir. Donc, rien n’est perdu; il aurait fallu y penser: Théologie digitale, Philosophie digitale, Renaissance digitale et ainsi de suite jusqu’à la Géographie et la Préhistoire. Merci messieurs les Digitalistes.

«Approche historique». Depuis grosso modo deux siècles, écrit Julien Syrac, nous nous approchons, nous les Occidentaux, du point de rupture avec la sensation de la réalité. Au bénéfice de l’Abstraction. Au bénéfice de l’idée qu’un jour les mondes rêvés, utopiques, virtuels (mondes susceptibles de s’améliorer à l’infini) iront se substituer à l’homme réel (mauvais et toxique d’après les spécialistes en la matière).

Selon le grand Bergson, le rire jaillit quand on plaque le mécanique sur le vivant. Pourtant, je n’ai jamais vu quelqu’un s’esclaffer devant tous ces gens qui circulent de nos jours masqués, casqués et branchés. Se peut-il que le philosophe se soit trompé? Je ne le pense pas. Tout est question de dosage. Bergson a vécu à une époque où on consommait encore du mécanique avec modération. Nous, nous en sommes à plaquer le vivant sur le mécanique. Et, apparemment, il n’y a personne pour s’amuser avec cette nouvelle donne.

Le parcours de l’Abstraction tracé dans Déshumanité est doublé des avertissements des grands romanciers auxquels l’auteur se réfère constamment. Raison supplémentaire pour que L’Atelier du roman choisisse de présenter et de commenter à plusieurs voix ce livre – dont la parution nous a été signalée par Thierry Gillybœuf, que nous tenons à remercier. Julien Syrac intègre dans la réflexion critique l’art du roman comme une voie de connaissance unique et irremplaçable. Sans omettre de tirer profit de deux qualités majeures de cet art: le scepticisme et l’humour.

Notre thèse est que l’idée d’un marché s’ajustant lui-même était purement utopique. Une telle institution ne pouvait exister de façon suivie sans anéantir la substance humaine et naturelle de la société, sans détruire l’homme et sans transformer son milieu en désert.<br /> Karl Polanyí, La Grande Transformation, 1944.

La déshumanité n’est pas le contraire de l’humanité. C’est le chemin qui conduit de l’humain au post-humain. Ne nous hâtons pas pour arriver au bout. Sur ce chemin, il y a tant de choses étranges à observer calmement, attentivement et toujours en s’amusant. Comme, par exemple, le monde éditorial (Morgan Sportès), une usine de notre temps (Raphaël Arteau McNeil), certains de nos contemporains (Olivier Maillart) ou, encore, notre chère Europe (Benoît Duteurtre).

Rencontres de Thélème. À partir de cette année, après huit Rencontres sur la liberté, nous inaugurons un nouveau cycle thématique: «Lire et relire Rabelais». Le court texte explicatif figure à la fin du volume.

Sur le chemin susmentionné, il nous arrive toujours des rencontres inoubliables, mirifiques comme celle de Jean-Yves Masson (Seiler), Massimo Rizzante (Pier Paolo Pasolini), Boniface Mongo-Mboussa (Faulkner), Marion Messina (Les Trois Mousquetaires) et Fernando Arrabal (la «mère» Mercedes).

Contre les covids, de la poésie (Yves Lepesqueur) et de la musique (Jacques Dewitte) trois fois par jour, matin, midi et soir, avant et après les repas. Et le rire de Sempé toute la journée – et pour toujours.
L.P.