Couverture du n° 103 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 103"

Flannery O’Connor – Le réalisme des lointains

 

Ce numéro spécial Flannery O’Connor peut être considéré comme la suite au précédent numéro dédié à Karel Čapek, le grand sceptique face au progrès technique. Maintenant nous passons de l’Europe centrale des années d’avant la Deuxième Guerre mondiale à l’Amérique des années qui ont suivi cette guerre. Le constat demeure le même : l’homme devient de plus en plus victime de son rationalisme et de ses projets radieux.
Flannery O’Connor est chrétienne catholique. Avec son humour inné de grand romancier et sa foi, magiquement accordés, O’Connor a réussi à décliner cette « victime » en une galerie de personnages inoubliables où les frontières entre la violence et la grâce, et entre la bêtise et l’innocence sont indiscernables.
Et ce n’est pas un hasard si, à l’occasion de cet hommage à Flannery O’Connor, nous ouvrons de nouveau nos pages à Pierre Jean Jouve, Balzac, Miguel Torga et au grand prosateur grec Alexandre Papadiamantis. Sans oublier tout le reste de la matière, les dessins humoristiques de Sempé inclus, qui, d’une manière ou d’une autre, confirme les prémonitions de Čapek et d’O’Connor.

 

Couverture du n° 103 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 103"

Flannery O’Connor – Le réalisme des lointains

 

Ce numéro spécial Flannery O’Connor peut être considéré comme la suite au précédent numéro dédié à Karel Čapek, le grand sceptique face au progrès technique. Maintenant nous passons de l’Europe centrale des années d’avant la Deuxième Guerre mondiale à l’Amérique des années qui ont suivi cette guerre. Le constat demeure le même : l’homme devient de plus en plus victime de son rationalisme et de ses projets radieux.
Flannery O’Connor est chrétienne catholique. Avec son humour inné de grand romancier et sa foi, magiquement accordés, O’Connor a réussi à décliner cette « victime » en une galerie de personnages inoubliables où les frontières entre la violence et la grâce, et entre la bêtise et l’innocence sont indiscernables.
Et ce n’est pas un hasard si, à l’occasion de cet hommage à Flannery O’Connor, nous ouvrons de nouveau nos pages à Pierre Jean Jouve, Balzac, Miguel Torga et au grand prosateur grec Alexandre Papadiamantis. Sans oublier tout le reste de la matière, les dessins humoristiques de Sempé inclus, qui, d’une manière ou d’une autre, confirme les prémonitions de Čapek et d’O’Connor.

 

Sommaire

SOMMAIRE

 

 

Couverture du n° 103 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 103

Flannery O’Connor – Le réalisme des lointains

 

 

SOMMAIRE

Ouverture

Cécilia Dutter, Grandeur et solitude de l’écrivain croyant
Jean Berthier, Paroles et parole
Nunzio Casalaspro, La terrible grâce du Seigneur
Sylvie Perez, L’art de la chute
Myrto Petsota, Résonances fécondes
Lambros Kampéridis, Catholique comme un athée dans le Sud américain
Romain Debluë, Le scandale
Trevor Cribben Merrill, Le roman selon Thomas d’Aquin
Pascale Privey, La vanité et la grâce
Emmanuel Dubois de Prisque, Pourquoi y a-t-il Flannery O’Connor plutôt que rien ?
Jérôme Couillerot, L’inouï et son double
Lakis Proguidis, Prophètes sans prophéties
Dates et œuvres

À la une : Yannick Roy

Critiques
Philippe Raymond-Thimonga, Dieu dans l’atelier de Pierre Jean Jouve
Yves Lepesqueur, Christine de Pizan romancière ?
Lakis Proguidis, La voix d’une civilisation – Alexandre Papadiamantis

 À la une : Trevor Cribben Merrill

De près et de loin
Maja Brick, La vacuité du Paradis
Patrice Charrier, En relisant Le Père Goriot

Les cahiers de l’Atelier
Alexandre Papadiamantis, Gagátos et le cheval
Olivier Biégelmann, Hors-Monde
Mikaël Gómez guthart, Le chasseur de parenthèses

 À la une : Théo Ananissoh

Au fil des lectures
Massimo Rizzante, À l’écart de tout, l’art de Miguel Torga

 

Ouverture

OUVERTURE

 

 

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Flannery O’Connor – Le réalisme des lointains

 

 

La qualité prophétique du romancier est liée à ce qu’il est capable de voir dans les choses proches les prolongements de leur signification, et capable de voir les choses lointaines de très près. Le prophète est un réaliste des lointains. C’est un réalisme de cette nature que l’on trouve dans les meilleurs exemples du grotesque moderne.

Ces lignes sont extraites de la conférence que Flannery O’Connor a donnée au Wesleyan College de Macon, en Géorgie, à l’automne 1960. Titre: «De quelques aspects du grotesque dans le roman du Sud.»

De Tolstoï à Chesterton et d’Anna Maria Ortese à Bernanos, il y a toujours eu de grands romanciers chrétiens dont les œuvres continuent d’être lues dans le monde entier. C’est à cette famille qu’appartient Flannery O’Connor (1925-1964). Quoique disparue prématurément, Flannery O’Connor a publié deux grands romans, La Sagesse dans le sang et Et ce sont les violents qui l’emportent, et trois recueils de nouvelles. Sur fond d’une quête existentielle et spirituelle qui n’a pas sa pareille, sa prose viscéralement antilyrique met en scène un des plus grands paradoxes du monde contemporain: plus ce monde est assujetti au rationalisme et à l’utilitarisme, plus il devient la proie facile du manichéisme, de la superstition et de la violence gratuite.

Je m’acquitte maintenant de la promesse faite à Philippe Muray de consacrer un numéro de L’Atelier du roman à Colette et un autre à Flannery O’Connor. Celui sur Colette a déjà été réalisé, il y a un an: «Colette – Les mille facettes de la séduction», n° 99, décembre 2019.

Ne nous fatiguons pas de lire et relire nos contemporains : Balzac (Patrice Charrier), Aimé Césaire (Théo Ananissoh), Miguel Torga (Massimo Rizzante) et Christine de Pizan (Yves Lepesqueur).

La science est puissance principale et, partant, aussi principale puissance politique. Ce qui compte, ce ne sont pas toujours (pas uniquement) ses réalisations, mais surtout le contrôle exercé par ses institutions qui canalisent tous les efforts « scientifiques », en sorte qu’il ne se passe rien, extérieurement ou intérieurement, en dehors d’elles. Ceci est cause d’une spécialisation à outrance, jointe à un dilettantisme pour ce qui est des « visions du monde », d’une haine de la philosophie comme mise en question et possibilité que la pensée prenne à tout instant une tournure imprévue.
Jan Patocka, L’Europe après l’Europe.

À Pierre Jean Jouve (Philippe Raymond-Thimonga) nous avons consacré le numéro 56 (décembre 2008) et à Alexandre Papadiamantis (celui qui signe) le numéro 30 (juin 2002). Deux écrivains chrétiens pas très catholiques. Question de voir, encore une fois, combien sont innombrables les voies du roman.

Muray nous manque terriblement. Il était le seul à pouvoir parodier le langage des spécialistes qui, ces derniers temps, nous assaille de toutes parts.

Sans jamais douter de sa foi, Flannery O’Connor n’a pas voulu, comme on peut le constater par ses autres écrits littéraires et sa correspondance, que son œuvre soit évaluée à l’aune de critères moraux et religieux. Son souci principal, comme pour tout romancier authentique, était de créer des personnages aptes à incarner nos mystères existentiels. Et cela contre «l’opinion, écrit-elle dans un de ses essais, qui depuis le xviiie siècle, et d’âge en âge, a tendance à croire que les mystères et les maux de la vie finiront par se dissiper grâce au progrès humain, et cette croyance persiste alors que pour la première fois cette génération doit faire face à l’extinction totale en raison de ce progrès».

N’arrêtons pas d’observer ce monde-ci (Yannick Roy, Trevor Cribben Merrill) ou l’autre (Maja Brick), ou tantôt l’un, tantôt l’autre, à la manière de Sempé.

2021. Le 104e numéro (mars) sera consacré à la VIIe Rencontre de Thélème: «Désir d’ailleurs: désir de liberté?», le 105e (juin), à Philip K. Dick, le 106e (septembre), à Danilo Ki‹ et le 107e (décembre), à John Cowper Powys.

Et pour ne pas désespérer, continuons à cultiver notre petit jardin des «tournures imprévues» (Olivier Biégelmann), Mikaël Gómez Guthart et Alexandre Papadiamantis).
L. P.